Recettes de famille

Quels souvenirs nous inspire la nourriture, les odeurs, les saveurs? Un repas de famille? Un plat préféré? Une personne chère? À ces questions, se posent d’autres interrogations et incertitudes, d’ordre linguistique, dans le cadre d’un atelier en francais pour des non-francophones: comment trouver les mots justes pour évoquer des plats, voire des ingrédients, qui n’ont pas toujours d’équivalent culturel dans une autre langue? C’est à ce défi que se sont attelés les participants du deuxieme atelier transgénérationnel, organisé en partenariat avec la société franco-écossaise de St Andrews. À partir de quelques textes littéraires consacrés à la nourriture – la fameuse madeleine de Proust, la soupe aux poireaux de Duras, et la tasse de thé de Banville – les participants ont recréé, avec des mots, des recettes qui leur sont chères.

What type of memories are triggered by food, smells and flavours? Does it remind of loved ones, of dishes, of family meals? In addition to these questions, writing from, or about food challenges linguistic conventions: how to find the right words to convey dishes and ingredients which may be specific to a certain culture? Participants in our second transgenerational workshop – organised with the St Andrews branch of the Franco-Scottish society – embraced this challenge. Using as starting points well-known French texts about food – Proust’s madeleine, Duras’ leek soup and Banville’s cup of tea, they tried to recompose treasured dishes… with words.

Voici une sélection des textes écrits:

 

Bubble and squeak

Je regarde mes sœurs,

Je note leurs visages terrifiés.

Evidemment elles se demandent

‘Qu’est-ce que Papa a fait ?’

 

Maman est malade, la pauvre,

Elle ne cuisine pas ce soir

Et Papa nous annonce

Je fais à manger et à boire’.

 

Il émerge de la cuisine

Il met les bols sur nos genoux

Un grand bol de ‘Bubble and Squeak’…

Pas ce que j’ai voulu.

 

Les pommes de terre et le chou

Sont les seuls ingrédients

Qu’on utilise pour préparer

Ce repas dégoûtant.

 

Nous disons, ‘Merci Papa !

Ça a l’air super…

Ça fait plaisir de manger

Une chose faite par toi, mon père.’

 

Nous apprécions son effort

Sinon j’aurais honte

En fin de compte n’oublions pas

C’est l’intention qui compte.

 

Lauren Fenner

 

Bœuf salé avec du choux, pain de soude irlandais, thé

Les éclats de rire remplissent la cuisine rouge, chaude. Les assiettes chinoises aux dessins bleus passent, de main en main, autour de la table, remplies de bœuf salé avec du choux, jusqu’à ce que tout le monde soit servi. En goûtant une tranche du pain de soude irlandais, les yeux de mon grand-père brillent avec les souvenirs de son enfance à Cork. Il se lance dans une histoire à voix basse, perdu dans ses pensées. Ma mère, ma sœur, mon frère et moi, nous nous penchons tous en avant. Même les deux chiens attendent au-dessous de sa chaise, soit pour entendre soit pour recevoir des petites miettes du repas. Ma grand-mère se lève pour faire du thé – elle connaît déjà cette histoire – et je le regarde tandis qu’elle assemble les tasses, choisies spécifiquement pour chaque personne. Je souris. C’est la fête de la Saint Patrick.

Catherine Sweeney

 

‘Crapaud dans le trou’ (traduction littérale du nom de plat ‘Toad in the hole’)

C’est quoi, le crapaud dans le trou?

Je ne sais pas, mais il se mange.

Il n’avait pas une voix d’ange

Mais se cacherait dans le houx.

 

Avant Noël, on ne sait d’où,

L’envie de saucisses s’arrange.

C’est quoi, le crapaud dans le trou?

Je ne sais pas, mais il se mange.

 

Oeuf, lait, farine et sel, c’est tout.

Une poêle chaude les change

En réconfort couleur orange,

Mystère recherché partout.

C’est quoi, le crapaud dans le trou?

 

Clive Sneddon (poème écrit d’apres ‘Le Thé’ de Théodore de Banville)

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